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Soutenance de thèse de Delphine Boissarie sur "La Maison Denis Frères (1862-1954) : trajectoire d’un réseau commercial et social entre Bordeaux et l’Extrême-Orient" (Bordeaux, 10 décembre 2015)

Le 9 décembre 2015 à 22h19

Soutenance de thèse de Delphine Boissarie
La Maison Denis Frères (1862-1954)
Trajectoire d’un réseau commercial et social
entre Bordeaux et l’Extrême-Orient

Université Bordeaux-Montaigne, salle Jean Bordes
Maison des Sciences de l’Homme d’Aquitaine
Jeudi 10 décembre 2015, à 14 heures



Résumé de la thèse :
"Le groupe Denis vient de fêter en 2012 ses 150 ans. Qu’y-a-t-il de commun entre cette firme multinationale du XXIe siècle et la maison de commerce bordelaise, implantée en Indochine, que nous nous proposons d’étudier, de 1862 à 1954 ? Essentiellement la famille Denis, actionnaire à 100 % du groupe actuel, avec une cinquième génération aux affaires, et sa rencontre toujours repensée avec le marché asiatique, au sens très large du terme . Une dynastie, en somme. En matière de capitalisme familial, la dynastie est considérée comme une sorte de nec plus ultra qui fascine l’imagination populaire et les historiens , mais, pour en être, la même famille doit posséder, contrôler et gérer l’entreprise pendant un minimum de quatre générations. Sous cet angle, la dynastie Denis est donc bien jeune. Pour le reste, la physionomie actuelle du groupe dépend majoritairement de décisions prises après 1954, qui ont requalifié progressivement le cœur de métier de la maison de commerce d’origine et bouleversé sa structure, ses réseaux, ses méthodes. Autrefois armateurs, exportateurs de riz, de maïs et de poivre indochinois, et importateurs de marques européennes en Extrême-Orient , les Denis, s’ils sont tout de même restés représentants de marques européennes, développent désormais en Asie leurs propres marques de produits alimentaires, au sein de filières intégrées, de l’approvisionnement à la distribution. Au-delà, ils s’intéressent aussi au marché de la technologie de la santé et au marketing des biens d’équipement.
La période fondatrice que nous étudions ici appartient donc davantage à la mémoire du groupe et à l’histoire, en effet, du commerce et de l’industrie. Mais pas seulement. Pour les historiens, il ne s’agit pas d’observer les entreprises pour elles-mêmes, et de leur renvoyer en miroir la chronologie de leurs réussites ou de leurs failles. L’entreprise fait en réalité partie de ses multiples portes d’entrée que l’historien utilise pour comprendre le passé. La trajectoire de la maison Denis Frères, de sa fondation à Saigon, en 1862, jusqu’aux accords de Genève en 1954, épouse la construction, le quotidien puis la désintégration de l’Indochine. Ce sont bien les singularités de cet épisode colonial du commerce français en Extrême-Orient qui nous attirent à travers l’exemple des Denis, seuls rescapés de la toute première génération d’entrepreneurs qui investit le Sud du Vietnam ou Đại Nam , au lendemain de la prise de Saigon (1859). Néanmoins, les circulations permanentes des Denis et de leurs courants d’affaires entre métropole, colonies et étranger (y compris dans les possessions coloniales autres que françaises) justifient une échelle d’analyse plus englobante ; celle de l’empire.
Avec la construction du marché intérieur indochinois, les problématiques de colonisation de la péninsule indochinoise et de sa « mise en valeur » marquent l’action de la Maison. Le réseau des agences de Denis Frères donne alors le visage de l’ « Indochine utile », du point de vue des affaires. Cet aspect touche aussi l’acculturation, à travers le déploiement, par exemple, de campagnes publicitaires pour promouvoir les produits européens auprès des populations locales. Il pose d’autre part le problème de la clientèle ciblée, et de l’étendue du marché réellement touché par les efforts de séduction du grand commerce européen. Au niveau international, en métropole, et ailleurs, le réseau commercial se combine au réseau social pour produire des alliances fructueuses.
Notre thèse s’appuie principalement sur des archives d’origine privée : celles de la famille et du groupe Denis, celles d’anciens employés de la maison Denis Frères, ainsi que celles de la Banque de l’Indochine, conservées aux archives du Crédit agricole. Nos recherches se sont ensuite portées sur les archives publiques, ce qui nous a mené à Bordeaux, à Paris, à Aix-en-Provence, mais aussi à Hô-Chi-Minh-Ville (centre n°2 des Archives nationales du Vietnam) et à Hanoï (centre n°1)."

Le jury est composé de :
Christophe Bouneau, Professeur, Université Bordeaux Montaigne, directeur de thèse
Philippe Chassaigne, Professeur à l’Université Bordeaux Montaigne
Xavier Daumalin, Professeur à l’Université d’Aix-Marseille
Jean-François Klein, Maître de conférences HDR à l’Université de Nantes, codirecteur
Bruno Marnot, Professeur à l’Université de La Rochelle
Philippe Papin, Directeur d’Études à l’École Pratique des Hautes Etudes.