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Editorial du président Hugues Tertrais

Le 1er novembre 2012 à 10h20

Éditorial
Hugues Tertrais
Avec ce numéro spécial d’Outre-mers. Revue d’histoire, publié également en parallèle sous forme de livre, nous disposons désormais d’une précieuse et volumineuse étude sur les origines, le contexte de la création et l’évolution de la Société française d’histoire des outre-mers et de sa revue, certainement la plus large à ce jour. Que la quarantaine d’auteurs qui y ont participé en soient vivement remerciés, en particulier le trio qui l’a porté – et qui a également guidé les premiers pas de notre Société dans le XXIe siècle : j’évoquerai d’abord Hubert Bonin, qui a eu l’idée de rassembler cette importante documentation et a patiemment construit l’ouvrage – il s’y interroge aussi sur le sens de ce centenaire et, en historien de l’économie, y évalue les rapports de la SFHOM et des milieux d’affaires ultramarins. Je citerai ensuite Bernard Droz, rédacteur en chef de la revue, qui s’intéresse plus particulièrement, en historien, au professeur d’histoire coloniale au Collège de France que fut son fondateur, Alfred Martineau ; Josette Rivallain enfin, porte son regard d’ethnologue et d’historienne sur les cent ans écoulés et interroge l’avenir.

En une exceptionnelle opportunité de procéder à une telle introspection, le centenaire appelait la remontée de cette histoire, non pas enfouie mais plutôt oubliée, parfois occultée, et qui est tout sauf banale. Â peine constituée, la Société de l’histoire des colonies françaises publie au début de 1913 le premier numéro de la Revue éponyme ; elle élargit ensuite son intérêt à l’ensemble du monde colonial ; elle suspend sa publication avec l’éclatement de la Seconde Guerre mondiale ;elle reparaît ensuite et se frotte au maelstrom de la décolonisation, avant de prendre le nom qui est maintenant le sien… Il n’était pas écrit que cette Société survive au XXe siècle, à cet Âge des extrêmes que stigmatisait Eric Hobsbawm.

Parcourir les tables de la Revue depuis son origine donne matière à une riche réflexion historiographique et épistémologique : l’histoire s’écrit au présent et, de l’hagiographie à la « repentance », de l’histoire militaire aux études postcoloniales, le spectre en est large. S’agissant précisément d’une histoire du « temps présent », la gestion de ses rapports avec la mémoire reste souvent délicate, entre intervention du politique et souvenirs des témoins.

Les générations actuelles sont celles du renouvellement des études coloniales et impériales, nourries des réflexions produites dans les centres académiques français et européens, mais aussi et de plus en plus hors d’Europe. Elles doivent prêter attention aux nouveaux lieux de production de ces recherches et aux problématiques qui y sont formulées. Elles doivent aussi s’insérer dans l’écriture générale de l’histoire, se positionner par rapport aux champs disciplinaires qui lui sont proches, comme l’histoire des relations internationales, tant les territoires et les sociétés concernées se répondent, et réfléchir à sa place dans une « histoire globale » à écrire.

Loin de la polémique académique, notre revue a pris depuis longtemps le parti de l’histoire. Elle est aussi un « lieu » où se côtoient, se croisent et dialoguent les réflexions et les analyses sur le champ qui nous rassemble. Nous pensons qu’elle doit affirmer cette qualité – cette singularité – pour donner plus d’intelligibilité à notre temps.