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Appel à communication pour la Journée d’étude "La contrebande hier et aujourd’hui : activité illicite et sociabilité transfrontalière" (Lille, 5 décembre 2018)

Le 10 août 2018 à 21h04

Appel à communication pour la Journée d’étude
’La contrebande hier et aujourd’hui
Activité illicite et sociabilité transfrontalière’
Organisée par l’Institut Frontières et Discontinuités (IFD)

Salle de séminaire de l’IRHiS
Institut de Recherches Historiques du Septentrion
Université de Lille
Mercredi 5 décembre 2018, de 10h à 16 heures



Appel valable jusqu’au 10 septembre 2018

"La création des frontières participe à la construction des États-nations. Elle engendre différents régimes commerciaux et juridiques qui prédisposent à l’apparition de flux illicites. La contrebande exploite les différences de réglementations entre des États. Elle est illicite pour des raisons sanitaires, culturelles ou de protection du marché national. Parfois pour la défense d’une cause politique, elle est aussi souvent une opportunité appréciable d’augmentation de revenus pour les sociétés locales. Face aux réactions policières des États qui tente de lui résister, les contrebandiers développent des stratégies spécifiques. Une très bonne connaissance du terrain leur est indispensable : du tracé de la frontière, des points de contrôles et des parcours des douaniers, mais aussi des sociétés du territoire voisin avec lesquelles il s’agit d’entrer en relation.
Si sur le plan fonctionnel la contrebande repose sur la discontinuité territoriale, elle créée aussi un lien social dans un contexte de proximité. La vie des espaces frontaliers est ainsi marquée par la présence de la frontière dont la surveillance évolue au gré des relations entre les États. Les populations frontalières peuvent tisser des liens étroits reposant sur l’existence d’activités légales ou illégales et sur un ressenti commun de leur position de résidents de la marge, éloignés de la capitale.
Dans le cadre de la formation du marché unique européen et de la volonté d’effacement des frontières intérieures qui la soutient, les services des douanes ont été réorganisés, préfigurant une reconfiguration scalaire de la contrebande et des espaces frontaliers de proximité en des espaces de plus longue distance. Il semble bien que les enjeux de la contrebande se portent à présent sur les réseaux et sur les nœuds de circulation ouverts au vaste monde.
Par ailleurs, la normalisation internationale des réglementations nationales n’est pas aussi efficace que ce qui était attendu. Contrairement aux prévisions, la convergence des normes entres les États n’a pas été systématique et les États continuent en partie à évoluer selon des logiques qui leurs sont propres.
La mise en œuvre de cadres d’intégrations à l’échelle régionale transfrontalière et à l’échelle transnationale qui regroupe des Etats contigus favorise le libre-échange, la réduction des barrières douanières et la coopération. Elle, ne concerne pas que l’UE mais aussi l’Amérique latine (Mercosur), l’Amérique du Nord (Alena), l’Asie (Asean) et l’Afrique (CEDEAO).
A l’exception de l’histoire (pour un bref aperçu des références bibliographiques voir ci-dessous), la production scientifique des sciences humaines et sociales de ces dernières années montre que la contrebande est essentiellement étudiée dans les régions non européennes (Bennafla, 2014 ; Dorfman, 2015). Lorsque la question des trafics illicites est abordée, c’est principalement à travers les migrations de population entre l’Europe et les régions voisines d’Afrique et d’Asie (Webber, 2017) et celui de la drogue pour les trafics de marchandises (Chassagne, 2004). Pourtant, et c’est un paradoxe, les régions frontalières d’Europe cherchent à mettre en valeur les héritages des réalités économiques et sociales de la contrebande.

L’objectif de cette journée d’études est d’interroger la réalité des sociétés frontalières en Europe à travers la contrebande entre le 18ème siècle et nos jours. Adriana Dorfman, professeure de géographie à l’Université Rio Grande do Sul à Porto Alegre au Brésil, travaille depuis près de 15 ans sur les pratiques de la contrebande en Amérique latine. Visiting professor à l’Université d’Artois, elle fournira un éclairage sur cette région du monde ainsi qu’un cadre conceptuel et théorique pour préciser l’intérêt de l’étude de la contrebande et des trafics illicites dans le champ des border studies. D’autres communications centrées sur l’Europe et venant des sciences humaines et sociales seront bienvenues pour prolonger l’analyse à l’échelle européenne.
Elles permettront de comprendre comment la contrebande s’inscrit dans les sociétés frontalières à l’échelle locale, mais aussi de repérer les liens qui se tissent à travers la frontière et les sociabilités qui se dessinent. Elles permettront aussi d’analyser les processus de construction de la frontière ainsi que ceux de son éventuelle dévalorisation dans le cadre de l’intégration régionale.
Il s’agit de savoir comment la contrebande structure les sociétés frontalières et transfrontalières, dans quelle mesure elle est créatrice d’identités, de préciser ses acteurs ainsi que son cadre spatial et temporel. Il convient aussi de savoir dans quelle mesure les processus d’intégration régionale prolongés par la construction européenne recomposent les sociétés frontalières et transfrontalières. Il s’agit enfin de préciser les héritages de ces activités dans les territoires et leurs sociétés."

Références
Béaur G., Bonin H., Lemercier C. (coord.) (2006). Fraude contrefaçon et contrebande de l’Antiquité à nos jours, Genève, Droz.
Bennafla, K. (2014). Etat et illégalisme  : quelle géographie ? Une approche par les flux marchands depuis l’Afrique et le Moyen-Orient. Annales de géographie 700(6) : 1338–1358.
Chassagne, P. (2004). Opiacés et routes des Balkans : facteurs géographiques, historiques et politiques du phénomène. Hérodote 112(1) : 139–156.
Dorfman, A. (2015). Smuggling : power networks, moral geographies and norm enforcement at work at southern Cone borders. In Borderities and the politics of contemporary moble borders. London : Palgrave MacMillan.
Figeac-Monthus M., Lastécouères C. (éd.) (2012). Territoires de l’illicite : ports et îles : De la fraude au contrôle (XVIe-XXe s.) Armand Colin.
Montenach A.. (2017). Femmes, pouvoirs et contrebandes dans les Alpes au XVIIIe siècle, Grenoble, PUG.
Schaufelbuehl J. (2009). La France et la Suisse ou la force du petit. Évasion fiscale, relations commerciales et financières (1940-1954), Paris, Presses de Sciences Po.
Webber, F. (2017). Europe’s unknown war. Race & Class 59(1) : 36–53.

Proposition de communication :
Merci d’envoyer vos propositions pour le 10 septembre 2018 sous la forme d’une brève présentation biographique de 20 lignes, d’un titre de communication et d’un résumé d’une page à : bernard.reitel@univ-artois.fr et beatrice.touchelay@free.fr



Source de l’information :
https://ifd.hypotheses.org/les-journees-de-lifd